Comme à son habitude en dehors des cours, Eirlys rodait dans Kadic, n’effectuant jamais le même parcours. Le but étant de surprendre les éventuels sécheurs, ou prévoir de possible incident. Elle avait déjà surpris certains élèves en plein élan de créativité. Particulièrement un certain Odd Della Robbia, qui ne manque pas d’imagination pour innover dans les âneries à faire. Mais c’est derniers temps, c’était plutôt calme.

Elle avait déjà fait le tour des classes, et déambulait dans les cours de récréations. Elle s’arrêta devant le bâtiment administratif. Et si elle coinçait encore Odd et sa bande dans la salle des archives… ? Elle ne pouvait pas prendre le risque de laisser des élèves accéder à ce genre d’endroit. Ça ne lui coûtait rien d’aller vérifier, après tout.

Elle reprit donc sa marche, et pénétra dans le bâtiment administratif. Le hall était désert. Elle fit quelques pas, et aperçue une silhouette à vue de nez suspecte revenant du secrétariat.
La personne semblait marcher sans réel but. Eirlys accéléra donc silencieusement le pas pour rejoindre la silhouette, et surgir derrière lui.

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« Je peux vous aider ? », lança-t-elle de son habituel ton froid.

Mais lorsque la personne se retourna, elle chancela légèrement. Il avait les cheveux blancs, et les yeux rouges… Elle n’avait jamais vu un autre albinos, à part son frère.

Cela faisait déjà une bonne demi-heure que Stanley errait dans les couloirs de Kadic, tel un fantôme -et la comparaison était des plus adaptées- flânant ici et là sans trouver la moindre victime. Et par victime, il s'agissait en réalité de la personne de la comptabilité. Du moins, c'était vers cette dernière que l'on avait dirigé le médecin tout égaré. C'est que l'établissement avait drôlement changé depuis ses études, et il s'était surtout considérablement agrandi. Suffisamment pour ébranler l'orientation déjà peu fiable du bonhomme en blanc qui s'aventurait à présent du côté administratif de l'école. Son problème était le suivant: une anomalie au niveau des commandes de matériel médical pour l'infirmerie. Et puisque tout cela s'effectuait au bureau de la compta, il en avait fait sa quête officielle de l'après-midi.

C'était au secrétariat qu'on l'avait éclairé un peu plus sur sa destination, puisque Stan n'avait véritablement aucune idée du service auquel il devait s'adresser pour son problème de cotons. Car oui, c'était bien eux qui lui causaient du souci, trop nombreux, même pas à la bonne forme, qu'ils étaient vulgaires. Mais ils ne s'en tireront pas comme ça... Après avoir été plus ou moins renseigné, l'albinos quitta la secrétaire très peu affectée par les ennuis de l'énergumène et sa ouate, qui tournait déjà à la recherche de quelqu'un de plus qualifié pour résoudre ses problèmes. Il n'avait même pas remarqué la présence d'une jeune fille dans le hall, qui le suivit comme un serpent avant de l'attaquer froidement.

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« Je peux vous aider ? »

Stan sursauta comme pris sur le fait, manquant même de perdre son chargement, tout en se retournant vers l'origine de cette agression, et ce qu'il vit ne manqua pas de le surprendre. Des cheveux blancs comme neige, la peau pâle, deux yeux rouges. C'était à peu de choses près son propre reflet dans le miroir, mais en version féminine et plus menue. Les deux paraissaient aussi perplexe l'un que l'autre à la vue d'un semblable qu'ils devaient avoir rarement eu l'occasion de rencontrer jusque là. Un duo d'albinos au sein d'un même établissement, c'était assez insolite. Stanley se libéra une main pour remettre ses lunettes en place tout en essayant de formuler une réponse.

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« Je... cherchais la comptable de l'école. Sans trop de succès je dois l'avouer. Une affaire de cotons. »

Il agita son carton rempli des fibres maléfiques pour le désigner. La jeune fille ressemblait à une élève, ou bien elle utilisait des produits miracles pour garder une jeunesse éternelle. Son regard rougeoyant alla à droite et à gauche avant de se reposer sur son interlocutrice. Puisqu'elle lui avait si généreusement proposé son aide, pourquoi ne pas en profiter ? Autrement il était bon pour un nouveau tour dans les couloirs et les étages de Kadic.

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« Tu aurais une idée ? La secrétaire m'a vaguement expliqué où elle se trouvait mais je la soupçonne d'avoir voulu se débarrasser de moi ! »

Eirlys resta quelque instant à fixer la personne qu’elle venait d’interpeller. Il resta lui aussi muet quelques instants, apparemment aussi étonné qu’elle.
Elle reprit ses esprits quand l’albinos porta sa main à son visage pour remettre ses lunettes en place, semblant chercher ce qu’il allait pouvoir dire. Il faut dire que les approches d’Eirlys étaient pleine de … tact.

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« Je... cherchais la comptable de l'école. Sans trop de succès je dois l'avouer. Une affaire de cotons. »

La comptable ? Une affaire de cotons ? Elle n’eut pas le temps de se poser plus de question que son interlocuteur agitant le carton qu’il avait dans les bras. Elle y jeta un rapide coup d’œil. Du coton. Plein de coton.
A en juger par sa tenue très … blanche, et à se carton de cotons, Eirlys pouvait plus ou moins en déduire qu’il était infirmier, ou quelque chose du même genre. Elle avait vaguement entendu parler d’un nouvel arrivant dans l’équipe de Kadic, il y a quelque temps. Peut-être était-ce lui ?
Il avait l’air de planer assez loin, comme gars. Son regard se balada un peu partout dans la pièce avant de se reposer sur Eirlys. Il sembla réfléchir quelques secondes, avant de demander.

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« Tu aurais une idée ? La secrétaire m'a vaguement expliqué où elle se trouvait mais je la soupçonne d'avoir voulu se débarrasser de moi ! »

Eirlys cligna des yeux légèrement. Se débarrasser de lui ? C’est vrai que s’il y avait bien quelqu’un de moins sympathique qu’Eirlys dans ce lycée, c’était bien la secrétaire…

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« Le bureau de l’agent comptable est par là-bas. »

Elle se retourna légèrement pour indiquer une direction en tendant le bras. Elle reposa son regard sur son confrère albinos, l’invitant à la suivre.

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« Je vais vous guider. Vous n’avez plus qu’à espérer qu’il y ait quelqu’un. »

En temps normal, elle aurait juste indiqué la direction, mais là, elle avait comme l’impression qu’il aurait pu se perdre dans le couloir…

La jeune fille à la longue chevelure blanche tendit un bras en direction de ce qui devait être le lieu désiré du bonhomme égaré, néanmoins ravi d'apprendre qu'il n'avait pas fini par changer de bâtiment à force de tourner en rond. Kadic n'était pas un labyrinthe pour autant, mais c'était presque chose aisée pour Stan que de se perdre en pensant bêtement à autre chose, encore un talent caché de l'albinos dont il aurait largement préféré se passer. Fort heureusement, sa pâle compagnie de fortune avait déjà la solution à son problème d'orientation.

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« Je vais vous guider. Vous n’avez plus qu’à espérer qu’il y ait quelqu’un. »

Elle fit un premier pas en avant pour le pousser à la suivre, ce qu'il fit sans protester, un hochement de tête en signe de remerciement tandis que le duo pour le moins original se mettait en route. Au moins avait-il la garantie d'arriver à bon port, bien qu'il était encore incertain d'y trouver son hôte une fois sur place. C'est que ces personnes passaient beaucoup de temps à parcourir l'établissement, de bureau en bureau, plus qu'elles ne devaient en passer sur leur chaise. À cette pensée, Stanley afficha un air ennuyé, peu enthousiaste à l'idée de devoir camper devant la porte de la comptable.

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« Je pourrais toujours l'attendre en recomptant les boules de coton... c'est infernal, il en fallait des carrés, celles-ci sont pelucheuses et se mélangent comme des gros moutons impossibles à séparer. Le problème, c'est que j'ai cinq cartons comme ça et 3459 cotons inutiles au total -ils en ont même oublié un, les fourbes- »

L'infirmière avait beau dire que ce n'était pas si grave, cela le dérangeait. Ils avaient d'ailleurs passé une partie de la matinée à négocier sur le matériel médical de l'infirmerie. Hélas, si Stanley l'avait emporté pour ses cotons chéris, elle en revanche avait obtenu les pleins-pouvoirs quant aux marques des produits hygiéniques et désinfectants. Pour être dure en affaire, elle l'était rudement, et puis c'était son infirmerie avant tout. Ça, il risque de l'entendre pour un long moment... Mais à force de divagations, le médecin en avait oublié la politesse, aussi leva-t-il le nez de son regrettable troupeau de cotons pour s'adresser à sa voisine et ainsi se présenter.

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« Au fait, je m'appelle Stanley Collins, je m'occupe de l'infirmerie avec Yolande. Et toi, tu es élève ici ?»

Après tout, son arrivée à Kadic est assez récente, aussi on ne savait pas trop qui il était, même s'il ne passait pas tout à fait inaperçu avec sa tignasse immaculée. Enfin, et ce depuis quelques minutes, il savait au moins qu'il n'était plus vraiment le seul personnage atypique en son genre.

La jeune fille avait repris sa marche en direction du bureau de l’agent comptable de Kadic, suivit de près par son compagnon albinos. Il lui avait adressé un hochement de tête en guise de remerciement, chose à laquelle elle n’avait –bien entendu- pas répondu.
Il y avait un sérieux problème d’organisation dans cet établissement. Laisser airer comme ça un membre du personnel… Qui sait depuis combien de temps il tournait dans le lycée pour son histoire de coton ? Peut-être des heures déjà. Eirlys était certaine que personne n’avait même daigné calculer le pauvre homme, à l’exception de la secrétaire qui s’était chargé de l’éloigner sans vraiment répondre à ses attentes…. Enfin, ce n’est pas comme si Eirlys s’en préoccupait vraiment.
L’albinos égaré brisa le silence en renchérissant sur son histoire de coton.

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« Je pourrais toujours l'attendre en recomptant les boules de coton... », Lança-t-il. « C'est infernal, il en fallait des carrés, celles-ci sont pelucheuses et se mélangent comme des gros moutons impossibles à séparer. Le problème, c'est que j'ai cinq cartons comme ça et 3459 cotons inutiles au total -ils en ont même oublié un, les fourbes- »

Eirlys se retourna à peine pour lui adresser un regard en coin, une expression neutre sur son visage. Un vrai spécialiste aurait pu y voir une trace d’étonnement. Il avait vraiment compté chaque coton… ?
Elle pouvait, en creusant bien, comprendre le besoin de cotons carrés plus que ronds par soucis de praticité ou d’esthétique, mais de là à les compter… Et de s’en souvenir…
L’homme gardait le nez dans son carton, apparemment pensif, pendant que le cerveau de la collégienne tentait de supprimer toutes ses informations envahissantes qui perturbaient son flux de pensées habituel.
Après quelques secondes, la voix de l’Homme en blanc s’éleva de nouveau.

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« Au fait, je m'appelle Stanley Collins, je m'occupe de l'infirmerie avec Yolande. », dit-il. « Et toi, tu es élève ici ? »

C’était donc bien un infirmier, alors. Stanley Collins…
Elle s’arrêta de marcher quelques secondes. Pour dire les choses clairement, la collégienne n’était pas très à l’aise avec les présentations, et ce moment tant redouté à chaque fois qu’elle voyait de nouveau visage était finalement arrivé. Avec les personnes de son âge, c’était toujours assez… tendu. Mais là, c’était un adulte, non ? Pas besoin de se poser trop de questions. Surtout qu’il oublierait peut-être tout ça rapidement, vu le genre de gars…
Elle se remit à marcher.

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« Hmm. » Elle hocha la tête. « Oui, je suis en 4ème. Mais je suis aussi surveillante. Pour des raisons de… manque de personnel. »

Même pour elle, s’était dur de se rappeler comment elle était venue à surveiller les couloirs. Ca remontait à l’arrivée de son frère au collège. Elle avait ouïe dire qu’il avait été nommé « surveillant » pour éviter qu’il ne fasse trop de grabuge en se battant avec tout le monde… Et ils avaient enrôlé sa jeune sœur lors de son entrée au collège pour les même raisons. Le bon vieux, si on peut l’appeler comme cela… Depuis, elle n’avait pas quitté son poste.

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« Je m’appelle Eirlys Vermilion. Enchanté, Monsieur Collins. »

Elle n’était pas très douée pour avoir l’air amical, elle espérait seulement n’avoir pas eu l’air trop… agressive.

Elle s’arrêta finalement devant une porte. Elle se retourna vers Stanley et brandit son index en direction de la porte à côté d’elle, indiquant la petite plaque métallique sur la porte. « Bureau de l’Agent Comptable ». On ne pouvait pas faire plus clair…